Manœuvres de l’impérialisme français au Sahel

Publié le par Le blog de la Gauche Anticapitaliste du Tarn & Garonne

Manœuvres de l’impérialisme français au Sahel

La France de François Hollande est une France guerrière. Elle a déjà fait deux guerres sur le continent africain. La guerre au Mali (soutenue néanmoins par beaucoup de Maliens) a été l’occasion pour le Président français de se poser en rempart contre le terrorisme tandis que l’intervention de la France en Centrafrique fin 2013 nous confirme que le viril François aurait dû dire du débat de la campagne présidentielle française de 2012 contre Nicolas Sarkozy, « Moi, Président de la Françafrique ! ».

Convergence d’intérêts

Déjà en 2010, Aïr Info, titre influent d’Agadez analysait : « A long terme, le coup d’éclat d’Al-Qaïda Maghreb islamique dans le Nord du pays pourrait bien servir l’intérêt de la France. Elle pourra ainsi légitimer sa volonté de contrôler militairement la région ». Quatre ans plus tard, cette analyse semble se confirmer. En effet, si la stratégie de déstabilisation de la région du Sahel par les combattants d’AQMI (Al Quaida au Maghreb Islamique – ex GSPC – Groupe Salafiste pour la Prédication et le Combat) ainsi que les djihadistes de tout bord est avérée, il n’en demeure pas moins que l’éclat de leurs actions (rapts d’occidentaux, attaques des intérêts au Sahel des intérêts des multinationales) profite aussi à l’impérialisme français. La parfaite réussite des opérations d’AQMI prouve par ailleurs une certaine complaisance locale, y compris celle des gouvernements locaux, souvent corrompus par les multinationales capitalistes et se souciant peu du sort des populations locales qui elles, subissent violemment le racket organisé des ressources qui leur appartiennent.

Mépris d’Areva

Depuis quelques temps, le bras de fer entre Areva et le Président nigérien Mahamadou Issoufou réclamant quelques miettes de plus pour son peuple (12% de redevance au lieu des 5,5% actuel) nous montre bien le mépris du groupe français à l’égard du Niger qui lui fournit pourtant une bonne part de son uranium. Le scandale révélé par l’observatoire du nucléaire en décembre 2012 du don d’un avion au Président Issoufou par Areva nous indique que la corruption est souvent le moyen le plus efficace pour faire plier les gouvernements[1]. D’ailleurs, M. Issoufou connait bien Areva puisque cet ingénieur des mines (diplômé de l’école nationale supérieur des mines de Saint-Étienne) a aussi été directeur d’exploitation de la mine d’Arlit qui appartient en partie à Areva.

Le Sahel, zone à risques

Le Sahel (Mali, Mauritanie, Niger, Sénégal, Burkina Faso, Tchad…), est bien devenu une zone à hauts risques. Les attaques contre les intérêts de la France n’épargnent aucun pays du Sahel. Au Niger par exemple, il semble que ce soient les difficultés économiques qui ont poussé les rebelles touaregs vers AQMI car les revenus de l’uranium (exploitées par Areva) ne profitent pas du tout aux populations locales. De plus, la compagnie française néglige les questions environnementales et le collectif « Areva ne fera pas la loi au Niger » ne cesse de dénoncer le comportement du groupe français au Niger depuis de nombreuses années. Selon Seidik Abba (journaliste nigérien), l’adhésion des touaregs à AQMI n’est pas idéologique mais stratégique car dans la région d’Arlit (où se situent les gisements d’uranium) par exemple, la défiance vis-à-vis d’AREVA s’est récemment fortement accrue.

À qui profite donc le crime ?

Certainement pas seulement à AQMI qui récolte certes beaucoup d’argent grâce aux rançons tout en se faisant une publicité quasi gratuite à travers les médias occidentaux mais aussi à la France, implantée de longue date dans la région. La déstabilisation du sahel est profitable à la France qui dispose d’avantages comparatifs (grâce à ses réseaux) par rapport aux autres nations impérialistes. Celle-ci n’incite pas par ailleurs les autres multinationales impérialistes (Chine, Etats Unis…) à s’y implanter mais aussi parce qu’elle justifie une présence militaire française dans la zone, souvent sur appel des gouvernements locaux. Ce fut le cas au Mali mais aussi en Centrafrique.

L’enjeu : les ressources africaines

Depuis plusieurs années, la France est une nation en guerre. Afghanistan, Côte d’Ivoire, Mali, Centrafrique. Sarkozy ou Hollande, même combat ? Très certainement car le véritable enjeu est bien le partage des ressources du continent africain. La France, qui s’est laissé distancer par la Chine (négociateur sans état d’âme avec les dictateurs du continent) veut certainement rattraper son retard et ramener cette zone du continent sous sa coupe. La Chine est en effet ambitieuse en Afrique. Le nouveau siège de l’union africaine (flambant neuf) inauguré en 2012 à Addis Abeba est un cadeau de la Chine à l’Afrique. Son coût est de 154M € tandis que le commerce entre la Chine et l’Afrique pèse aujourd’hui 93 milliards € contre à peine 15 milliards, dix ans plus tôt. Mais il n’y a pas que la Chine. L’Inde, le Brésil veulent aussi leur part du gâteau africain. Cette nouvelle donne incite certainement la France à se maintenir par tous les moyens nécessaires afin de préserver son pré-carré.

La coopération militaire entre le Mali, le Niger et la France, se trouve aujourd’hui renforcée et la présence militaire française dans la région accrue. L’impérialisme a plus d’un tour dans son sac pour continuer à exploiter encore et toujours les pays pauvres.;

Moulzo. Publié dans le bulletin d'Ensemble! du mois de mars.

[1] Voir article de Bertold du Ryon : www.europe-solidaire.org/spip.php?article31063

Manœuvres de l’impérialisme français au Sahel
Manœuvres de l’impérialisme français au Sahel

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